Bouches-du-Rhône 11/09/2020
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Ouverture de la chasse : “Certaines sociétés de chasse ont appris à se passer de la fédération départementale”

Depuis le mois d’avril, Michel Bruchon est le nouveau directeur de la Fédération départementale des chasseurs des Bouches-du-Rhône. Bon connaisseur du monde cynégétique et lui-même chasseur, cet ancien officier supérieur de l’armée de terre – il a commandé le camp de Canjuers, dans le Var – a précédemment dirigé la Fédération départementale des chasseurs des Hautes-Alpes. Sa première mission est de remettre de l’ordre dans une structure en perte de vitesse, déchirée par des tensions internes et des dysfonctionnements qui ont conduit à sa mise sous tutelle par la justice, en avril 2018.

Michel Brunon est le nouveau directeur de la Fédération des chasseurs des Bouches-du-Rhône. (© J. Dukmdjian)

• Quelle est votre feuille de route pour remettre sur pied la fédération ?

Michel Bruchon : “Ma mission est simple : j’ai été recruté par l’administrateur provisoire, qui a lui-même reçu mandat de la présidente du Tribunal d’Aix, pour rétablir la Fédération des chasseurs des Bouches-du-Rhône dans un fonctionnement normal et régulier. Cela implique de regagner la confiance des services de l’État, qui s’est érodée au cours des dernières années, et de rétablir des liens avec la DDTM et la Chambre d’agriculture. Tous ces services attendent maintenant des preuves concrètes. En parallèle, j’ai identifié plusieurs axes de travail. Le premier est la reprise en main des missions de services publics de la fédération, comme la formation au permis de chasser, précédemment assurée par des équipes de bénévoles. Je souhaite remettre un encadrement, avec des salariés, pour la mise en œuvre de ces missions qui incombent à la fédération. Le deuxième volet est la prévention et l’indemnisation des dégâts de grand gibier. Tout cela nécessite d’y voir clair et d’acquérir des compétences qui font aujourd’hui défaut, et ne permettent pas de rattraper le retard dans le traitement des dossiers. Le troisième concerne la rédaction d’un nouveau Schéma départemental de gestion cynégétique, pour remplacer le précédent, arrivé à échéance le 13 août dernier.”

 

• À quelle échéance sera-t-il disponible ?

M.B. : “Il devrait être prêt pour la fin de la saison de chasse, en juin prochain. Le manque de données sur l’état, le suivi des populations et des habitats, nous contraint à une réécriture de ce document, au lieu d’une simple mise à jour. De nombreuses sociétés de chasse ont été exemplaires, en réalisant des comptages et des suivis du petit gibier (lapins et perdrix rouges). Nous avons, d’autre part, des indications sur le nombre de prélèvements effectués, en fin de saison, avec les carnets de battues. Mais ce n’est pas suffisant : nous avons besoin, au niveau départemental, de connaître l’ensemble des prélèvements effectués sur les territoires, d’accompagner et de piloter tout ce qui touche à l’aménagement du biotope, la sauvegarde des habitats. L’objectif est de remettre en place un vrai schéma, avec des objectifs cynégétiques ambitieux, en concertation avec les mondes agricoles et forestiers. Ce n’est qu’après cette phase de concertation qu’on entrera dans une seconde étape de consultations, plus officielle, au cours duquel le projet de schéma sera soumis à la Commission départementale de la chasse et de la faune sauvage, qui donnera son avis. Puis à la direction du Parc des calanques et celui de Camargue, qui émettront à leur tour un avis. Enfin, le schéma sera soumis à l’approbation du préfet et deviendra dès lors opposable aux chasseurs, pour une durée de six ans.”

 

• Comment envisagez-vous ce Schéma départemental de gestion cynégétique ?

M.B. : “Je le vois comme une épine dorsale, à l’image d’un projet d’entreprise, pour décliner les ressources et le savoir-faire dont nous avons besoin. Il s’accompagnera d’actions de communication et d’une recherche de financements, dès lors que nous aurons identifié des projets que nous pourrons développer, avec des partenaires du monde de l’eau, de la forêt, de l’agriculture... La chasse est morte si elle se referme sur elle-même : nous devons nous ouvrir, trouver des synergies. Dans un deuxième temps seulement – quand l’administrateur provisoire estimera que le moment est venu de remettre en place un conseil d’administration –, ce sera aux chasseurs de faire le bon choix, en mettant en place de nouvelles personnes, avec de vraies ambitions pour la chasse au niveau départemental, à moyen et long terme. Dans le fonctionnement précédent, ce qui est peut-être le propre d’une association, on mélangeait un peu tout. Les présidents de sociétés de chasse appelaient celui de la fédération départementale, pour lui présenter leurs demandes. Mais ce n’est pas le rôle d’un président : c’est celui d’un directeur. Ce mélange des genres est préjudiciable pour une petite organisation comme la nôtre, avec une dizaine de salariés. Ce n’est pas spécifique aux Bouches-du-Rhône, mais j’estime que le directeur doit avoir les coudées franches avec ses équipes. Un sujet hautement sensible, comme les subventions annuelles pour les sociétés de chasse, était accordé à la tête du client, avant la mise en place de l’administrateur judiciaire. Ce dernier a créé, avec le directeur de l’époque, une commission chargée de leur attribution, avec les présidents de société de chasse. Cela a permis de mettre en place un cadre, avec des thématiques susceptibles d’être financées, sur présentation de justificatifs comptables. Les subventions serviront à encourager et récompenser ceux qui travaillent dans le sens du schéma, plutôt que pour subvenir au fonctionnement d’une société de chasse et régler ses problèmes de trésorerie. Tout cela nécessite de définir des règles.”

 

• Vous avez rencontré les présidents des sociétés de chasse. Quelles étaient leurs attentes ?

M.B. : “J’ai pris contact avec une vingtaine de représentants des sociétés de chasse les plus importantes du département. L’objectif était de visiter leur territoire, d’établir si possible une relation de confiance, de comprendre leur fonctionnement, leurs difficultés, leurs attentes vis-à-vis de la fédération… pour faciliter les futurs échanges. J’ai constaté que bon nombre de sociétés de chasse ont appris à fonctionner en autonomie et à se passer de la fédération. Je les ai interrogés, lors de ces rencontres, sur leurs investissements en faveur de l’aménagement du territoire, leurs suivis de population, de repeuplement… Beaucoup d’entre eux réalisent ces actions indispensables, mais ne les faisaient plus remonter à l’échelon de la fédération. On ne peut pas réaliser une gestion cynégétique à l’échelle d’une commune.

Il faudra du temps pour revenir à un fonctionnement normal, en interne comme vis-à-vis de l’extérieur, et rétablir une confiance réciproque. Or, la fédération a connu une certaine instabilité au niveau de ses personnels ces dernières années : la première administration provisoire n’est restée qu’un an, les deux directeurs mis en place ont été remerciés l’un après l’autre, un nouveau directeur a été recruté par le deuxième administrateur… Cela explique sans doute le net recul des validations de permis de chasser.”

 

• Quel est le nombre actuel de permis validés à l’échelle de la fédération ?

M.B. : “Il est d’environ 14 000 validations à ce jour, contre plus de 16 900 l’an dernier. L’effet glu, ne me semble pas significatif. Le Covid, avec la peur d’un reconfinement, a pu jouer… Mais plus largement, je pense qu’il s’agit d’un sentiment de ras-le-bol et d’une volonté de boycotter la fédération, exprimés par certains en validant leur permis dans les départements voisins.”

 

• Comment prévoyez-vous de stopper cette hémorragie ?

M.B. :“L’objectif de toutes les fédérations est de limiter la perte et de maintenir les effectifs. Dans notre cas, cela nécessitera, dans un premier temps, de renouer le lien entre les chasseurs et leur fédération, de leur redonner confiance. Et, dans un second, de s’adresser aux jeunes, à la population féminine, pour espérer réconcilier l’opinion publique avec la pratique de la chasse.”

 

 • Comment avez-vous perçu, en tant que chasseur, la suspension de la chasse à la glu ?

M.B. : “Il s’agit d’une trahison. En 2017, lors de sa campagne présidentielle, Emmanuel Macron a évoqué des promesses vis-à-vis des chasseurs, qu’il n’a pas tenues. Il indiquait ne pas être favorable à l’arrêt des chasses traditionnelles, parce qu’elles font partie du patrimoine français, que ça n’enlève rien à personne… Cela s’est suivi d’une tromperie avec Jean Castex, qui a promis de maintenir la moitié des quotas de chasse pour nous inciter à annuler la manifestation de Brégançon, à la mi-août.”

 

 • La décision du président de la République peut-elle menacer, à terme, la chasse dans son ensemble ?

M.B. : “Nous nous mobilisons pour le respect des chasses traditionnelles, et pas uniquement pour la glu. Tous les chasseurs sont concernés par la manifestation du 12 septembre, à Prades. Nous essayons d’entraîner des élus avec nous, parce que toute la ruralité est mise à mal et notre loisir est compromis, à terme. On est dans le populisme avec une manipulation de l’opinion publique, via les réseaux sociaux ou le référendum d’initiative populaire (RIP).” 

Propos recueillis par Julien Dukmdjian

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